Renforcer la citoyenneté des jeunes : un défi qui ne doit pas se réaliser aux dépens des autres

12/01/16

Lundi 11 Janvier à la Maison de la Radio, François Hollande présentait ses vœux à la jeunesse et aux forces de l’engagement. Si la FAGE accueille favorablement les mesures annoncées ayant trait au développement de l’engagement et de la citoyenneté, elle regrette le silence du Président de la République sur les questions d’orientation, de formation, de démocratisation de l’accès et de la réussite dans le supérieur, de conditions de vie des jeunes ou d’insertion sociale et professionnelle.

La jeunesse a été décrétée comme priorité du quinquennat par François Hollande depuis 2012. Cette volonté doit trouver une traduction concrète par des mesures permettant de transformer profondément et durablement la place des jeunes dans la société. Pourtant le 15 décembre dernier, la parution d’un décret prévoyait de diminuer les Aides Personnalisées au Logement (APL) pour les jeunes salariés précaires. Dénoncé par la FAGE, le gouvernement a annoncé huit jours plus tard revenir sur cette décision. Dans un contexte où le taux de chômage augmente au sein de la population et plus particulièrement chez les jeunes, ceux-ci attendent plus que jamais des actions concrètes et le respect des engagements du Président de la République sur la priorité jeunesse. Pour les jeunes, la promesse du candidat Hollande “les jeunes vivront mieux en 2017 qu’en 2012” semble aujourd’hui bien éloignée des préoccupations du gouvernement.

Alors que depuis plusieurs mois les voix appelant à une ré-instauration du service national se multiplient, le Président de la République a apporté au défi de l’infusion de la citoyenneté auprès de chaque jeune une réponse de bon sens. C’est bien l'École qui doit être le creuset des valeurs républicaines. En annonçant la création d’un parcours de citoyenneté, comprenant notamment 300h en secondaire incluses au sein du socle commun, François Hollande replace l'École au cœur de la société et trouve la tonalité juste. Néanmoins, en rappelant cette mission fondamentale de l'École, le Président de la République ne peut ignorer qu’elle ne pourra être accomplie sans moyens supplémentaires.

D’autre part, l’école doit poursuivre son ouverture sur la société. Ainsi, la possibilité annoncée pour les élèves de 3ème d’effectuer leur stage non plus seulement en entreprise mais aussi dans le cadre d’associations va dans le bon sens. Au-delà de cette ouverture vers l’extérieur, l’Ecole doit poursuivre son ouverture de l’intérieur et accueillir en son sein les associations. Les associations peuvent, en effet, intervenir dans de nombreux cadres : accompagnement à l’orientation, intervention au cours de l’enseignement moral et civique, éducation à la sexualité, pédagogie par le projet. Ainsi, les élèves pourraient mettre à profit les enseignements transversaux pour développer en groupe un projet associatif. Pour simplifier cette interconnexion entre monde associatif et Ecole, le label “Association éducative complémentaire de l’enseignement public” est un outil à développer, par exemple en l'octroyant automatiquement aux associations par ailleurs labellisées “Association de jeunesse et d’éducation populaire”.

En outre, la FAGE demande à ce que la reconnaissance de l’engagement des jeunes soit amplifiée. Le Livret Citoyen annoncé par le Président de la République doit ainsi pouvoir intégrer un recueil des compétences acquises par son détenteur. L’enjeu est la reconnaissance et la valorisation des compétences développées en dehors du cadre formel. L’Université doit être accompagnée dans la certification des blocs de compétences informelles et non-formelles, qu’elles soient acquises au cours de la formation initiale sous forme de crédits capitalisables, ou tout au long de la vie via le dispositif de validation des acquis de l'expérience (VAE). L’appareil de formation doit s’adapter pour prendre en compte les compétences développées au sein du service civique et même dans la vie de tous les jours en s’appuyant sur un référentiel de ces compétences informelles et non formelles qui doit être édité et reconnu par les universités, l’ensemble des établissements d’enseignements supérieurs et les branches professionnelles.

Le Président de la République propose de rendre la validation d’un certain nombre « d’heures » ou de « formes » d’engagement impératives à l’obtention d’un diplôme universitaire. La FAGE sera très attentive à la concrétisation de celle-ci, notamment quant aux modalités, objectifs et moyens attachés à cette proposition puisqu’elle va dans le sens d’une volonté fondamentale de la FAGE : faire de l’engagement un pilier de la vie des jeunes étudiants.

Le dispositif de la période de césure, qui favorise justement cet engagement des étudiants et était une revendication forte de la FAGE, doit être effectivement mise en place dans l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur. En effet, si le cadre national est effectif depuis la rentrée 2015, de nombreux établissements ne l’ont pas encore retranscrit dans leur règlement intérieur. Les élus étudiants du réseau de la FAGE sont d’ores et déjà pro-actifs sur ce sujet.

La citoyenneté était donc un marqueur important du discours de François Hollande. Néanmoins, si l’engagement des jeunes et des étudiants est un sujet crucial, la participation politique en est un autre qui pourtant a totalement été éludé. Le gouvernement a pourtant fait un premier pas en instaurant le non cumul des mandats (mais la portée de cette mesure a été significativement diminuée en remettant à plus tard sa mise en place effective et en se contentant du nombre de mandat en même temps sans traiter de la question du nombre de mandats dans le temps). Afin de favoriser la participation politique des jeunes (et des moins jeunes), une remise en cause profonde des méthodes de fonctionnement actuelles de la politique est à mener, non pas pour tout réinventer mais pour s’inspirer de ce qui ailleurs fonctionne en augmentant la démocratie participative. Par exemple par le biais de budgets participatifs, d’une meilleure prise en compte des initiatives citoyennes, d’une vraie place donnée au CESE, CESER et Conseils de développement, etc.

Si la FAGE se satisfait de la tonalité des annonces qui ne stigmatise pas les jeunes au regard d’une citoyenneté dont ils ne témoigneraient pas suffisamment, le contenu du discours du Président de la République a cruellement manqué de propos essentiels. Les jeunes auraient aimé entendre parler d’une ambition pour l’orientation, de démocratisation de la réussite, d’investissement dans le service public d’enseignement supérieur, de mesures favorisant l’insertion professionnelle, l’accès au logement, à l’emploi de qualité. Si la symbolique citoyenne était au rendez-vous, pour les mesures d’égalité face à la réussite et à l’insertion, il faudra repasser. Pourtant, nombreuses sont les solutions à apporter à ces enjeux, et toutes sont à la portée du gouvernement.

La FAGE a depuis longtemps ciblé ces autres priorités :

  • Pour permettre et favoriser le développement du projet personnel de l’étudiant et ainsi lutter contre toute forme de ségrégation : l’orientation ;
  • Pour garantir l’égalité des droits dans l’enseignement supérieur : les aides sociales ;
  • Pour permettre aux étudiants l’accès à un logement à tarification sociale et s’adapter aux rythmes vie étudiante et à la mobilité étudiante : le logement ;
  • Pour révolutionner les méthodes d’apprentissage en faisant de l’étudiant un acteur de sa formation : la pédagogie ;
  • Pour garantir et favoriser la démocratisation de l’accès à l'enseignement supérieur : l'accessibilité.

Autant de sujets prioritaires qui n’auront pas retenu l’attention du Président de la République à l’occasion de ses vœux à la jeunesse.

Enfin, François Hollande a évoqué le service civique et son évolution. La FAGE se félicite qu’il n’ait à aucun moment été mention d’une obligation, qui serait néfaste et contre-productive. Le Président de la République a annoncé vouloir atteindre le seuil de 350 000 volontaires d’ici trois ans, notamment en amenant les moyens consacrés à hauteur d’un milliard d’euros sur la même durée. La FAGE ne peut que saluer cette volonté, mais reste prudente et attentive. En Janvier 2015 déjà, François Hollande annonçait l’universalisation du service civique, avec une montée en charge à 150 000 volontaires en un 2015. Un an plus tard le compte n’y est pas, faute de moyens.

La FAGE reste également attentive à ce que les futures missions qui seront proposées par les entreprises et services publics ne dénaturent pas le principe du service civique. Il est nécessaire d’en renforcer le cadrage et l’évaluation, ainsi que d’accompagner la montée en charge du nombre de missions par une augmentation annuelle des moyens. Il est aussi nécessaire d’engager de la volonté et des moyens dans la démocratisation du service civique afin de permettre plus de mixité sociale parmi les volontaires qu’il mobilise.

Pour la FAGE, la force du service civique est de permettre l’engagement de tous les jeunes en faveur d’une mission d’intérêt général. Cette universalité quant à la possibilité d’accéder au service civique a été réaffirmée par François Hollande et se base également sur l’indemnité perçue par le jeune qui lui permet de subvenir à ses besoins indépendamment de son origine sociale. Le service civique étant un engagement, il ne peut se confondre avec un emploi ce qui, nécessairement, se reflète dans le champ des missions proposées. Ainsi, la possibilité ouverte aux entreprises publiques d’accueillir des volontaires en service civique doit être strictement encadrée, le risque de substitution à des emplois étant alors exacerbé.

De plus, puisque le recrutement d’un volontaire en service civique se base sur la seule motivation, il est nécessaire d’accompagner les structures d’accueil afin que les dispositifs de formation et d’accompagnement des jeunes soient optimaux et permettent effectivement au jeune d’être acteur de sa mission.

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