Service National Universel : un projet aux contours flous et anxiogènes

17/01/18

Régulièrement pointés du doigt par les discours politiques et les images médiatiques, les jeunes ne semblent que très rarement pouvoir trouver grâce aux yeux d’une opinion publique qui ne voit dans chaque génération qu’un recul par rapport à la précédente. Alors que les jeunes connaissent aujourd’hui une situation sociale critique, marquée par la précarité et le chômage, ils ne sont perçus que comme un problème qu’il faudrait résoudre et non comme des citoyens à part entière.

Le 28 mai 1996, lors d’une allocution télévisée, Jacques Chirac, alors président de la République déclare vouloir supprimer le Service National. Le Journal Officiel publiera la loi qui officialise la fin du service militaire le 28 octobre 1997. Vingt ans après, les élections présidentielles se voient être le théâtre d’une déferlante de propositions autour du rétablissement d’un service national obligatoire à caractère « martial et citoyen ». Un Service National Universel (SNU) serait lancé en phase expérimentale pour 2019 par le gouvernement.

La FAGE dénonce cette proposition démagogique qui vise à « recadrer » une jeunesse qui serait la source de tous les maux : radicalisation, délinquance, abstention, apathie et subversion. Des jeunes qui ne s’engageraient plus, devraient « renouer » avec la société par un service civique obligatoire, et des jeunes prompts à la radicalisation et aux pensées antirépublicaines devraient passer par un service national assurant de remettre chaque jeune dans le droit chemin. La FAGE avait d’ailleurs déjà eu l’occasion de rappeler avec fermeté son opposition à la mise en place d’un service national obligatoire.

Loin de vouloir assurer à tous les jeunes une protection sociale adéquate et un accès de toutes et tous à l’éducation supérieure, cette vision négative de la jeunesse occulte intégralement l’engagement quotidien de milliers de jeunes. Loin d’être cette génération « désengagée » dépeinte dans les discours publics, les jeunes s’engagent plus que toutes les générations précédentes. Et si l’on peut s’interroger sur la baisse de la participation électorale des jeunes, il est urgent de constater le niveau sans précédent d’engagement de la jeunesse. Le volontariat en service civique ou à l’international, le bénévolat associatif, l’engagement syndical ou politique ou encore l’engagement numérique, sont autant de formes nouvelles ou anciennes qui atteignent des niveaux sans précédent.

Il est dès lors faux et mensonger de désigner les jeunes comme repliés sur eux-mêmes, déconnectés de la vie publique et désintéressés des grands enjeux contemporains, quand il s’agît simplement d’une mutation des formes d’expression et de participation politique. En 2016, l’Institut National de la Jeunesse et de l’Education Populaire (INJEP) a montré que la part de jeunes de 18 à 30 ans qui s’engageaient bénévolement en 2016 était de 35%, contre 26% en 2015. Outre l’engagement bénévole, plus de 90 000 jeunes effectuent chaque année un service civique, et 15 000 jeunes s’engagent chaque année dans la réserve.

En conséquence, la promesse de campagne du Président de la République de rétablir un véritable « service national universel » apparaît profondément déconnectée des besoins des jeunes et bien plus au service d’un discours politique.

La FAGE a été auditionnée et a pu faire part de ses contre-propositions lors d’une audition à l’Assemblée Nationale mais également grâce à ses représentations au sein des multiples instances et conseils, notamment la Commission Armée Jeunesse (CAJ).

Le rapport parlementaire, qui devrait voir le jour à la fin du mois, laisse apparaître des pistes intéressantes qui s’éloigne du scénario initial proposé par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle. Le SNU deviendrait un « parcours citoyen » et serait porté non pas par les Armées mais par le ministère de l’Education Nationale. L’école est le véritable creuset de la république, et c’est son rôle de participer à l’émancipation citoyenne des nouvelles générations.

La FAGE jugera ce rapport sur table, mais les idées avancées semblent aller dans un sens bien plus souhaitable pour la jeunesse engagée de notre pays.

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