Plan Étudiants – Volet réglementaire : début de l'acte 2 de la réforme !

14/03/18

Suite à l’adoption de la loi ORE, le volet réglementaire de la réforme commence à être discuté. Le mois de mars est marqué par l'ouverture de concertations autour de la modification de l'Arrêté Licence et du Cadre National des Formations. Récemment, plusieurs textes réglementaires ont d’ailleurs été discutés à l’occasion du CSE du 5 mars et du CNESER du 6 mars.

La FAGE s’est abstenue sur le vote du décret ParcourSup lors du CSE principalement à cause d’une mesure entrainant l’annulation de toutes les demandes d’un candidat en cas de réponse hors-délai. Par un dialogue social sans concession, la FAGE a obtenu que le ministère revienne sur cet article, obtenant ainsi un délai supplémentaire de 5 jours, permettant plus de temps et plus de souplesse pour chaque candidat dans la procédure d’affectation. Il s'agissait d'un amendement important dans un contexte de stress intense des futurs étudiants finalisant leur choix de formation sur la plateforme.

Adopté par le CNESER, ce décret apporte également le détail de la définition des capacités d’accueil. Ainsi, le décret précise que le Recteur définit les capacités d’accueil des formations et que les candidatures sur ParcourSup constituent le critère prioritaire. Dès lors, les capacités d’accueil se doivent d’évoluer en fonction de la demande des lycéens néo-bacheliers.

D'ailleurs, après s’être fermement opposée aux modifications du PJL ORE par le Sénat, la FAGE avait d’ores et déjà obtenu du ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation un certain nombre de garanties réglementaires visant à sécuriser la définition des capacités d’accueil et à ouvrir de nouveaux droits pour les étudiants.

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Cette séquence n’est que le début du deuxième acte de la réforme. Celui-ci portera sur la définition du cadre réglementaire du Plan Étudiants, qui se traduira notamment par la modification de l’arrêté Licence et du Cadre National des Formations.

C’est une opportunité unique pour la FAGE d’ancrer dans le marbre de nombreuses avancées pour les étudiants, tout en restant ferme sur les lignes rouges. La FAGE rappelle que la réforme du Plan Étudiants n’apportera aucun changement concret si l’État ne prend pas ses responsabilités en termes de financement de l’ESR. La FAGE revendique l’augmentation d’un milliard d’euros par an du budget de nos Universités.

Arrêté Licence et Cadre National des Formations : positions et enjeux de la FAGE

Enjeu n°1 : Le Contrôle Continu Intégral (CCI)

Depuis de nombreuses années, la FAGE a fait du CCI son fer de lance en matière de pédagogie innovante. La FAGE lui préfère d’ailleurs le terme d’Évaluation Continue Intégrale (ECI). Expérimentée à l’Université d’Avignon et de Strasbourg depuis près de 8 ans, cette approche pédagogique a fait ses preuves en termes de lutte contre le bachotage, et d’amélioration de l’apprentissage des compétences et connaissances des formations. En moyenne, les licences ayant adopté l’ECI ont vu leur taux de réussite augmenter de 10%, en plus d’avoir délivré davantage de mentions.

La FAGE revendique que l’ouverture de l’arrêté Licence soit l’occasion de permettre enfin à tous les établissements qui le souhaitent, la possibilité de mettre en place l’ECI.  

Néanmoins, l’ECI nécessite un cadre. En effet, par essence, elle consiste en une multiplicité d’évaluations formatives, tout au long de l’année et venant permettre l’auto-positionnement et l’acquisition de l’ensemble des compétences et connaissances prévues par la formation. Ainsi, et comme expérimentée dans les établissements l’ayant adoptée, il est nécessaire d’exiger un minimum de 3 évaluations par enseignement. En effet, là où les conservateurs de tout bord préfèrent une seconde session, la FAGE revendique une approche d’évaluations formatives plurielles qui comprend intrinsèquement la notion même de rattrapage. De plus, il est obligatoire d’organiser une session de substitution pour les étudiants bénéficiant d’un statut particulier ou d’un régime spécifique d’études. La FAGE a d’ailleurs obtenu l’engagement de la publication d’un cadrage national réglementaire qui vise à généraliser les régimes spéciaux d’études à toutes les formations publiques d’enseignement supérieur. 

Dès lors, et lorsque ce cadre est respecté, alors l’organisation d’une « seconde session » devient caduque et même pénalisante. Elle passe notamment de 14 à 12 semaines le temps de formation par semestre. L’étalement des évaluations sur l’année universitaire permet d’ailleurs un meilleur emploi des locaux et participe ainsi de l'augmentation des capacités d'accueil. Néanmoins, il est indispensable que cette deuxième session reste dans la norme pour les formations qui ne souhaitent pas adopter l’ECI et respecter son cadrage.   

Enjeu n°2 : Référentiels et blocs de compétences

L’approche par compétence permet une meilleure lisibilité des diplômes tant pour l’étudiant que pour le monde socio-économique tout en permettant une flexibilité dans les rythmes d’apprentissage. Cette souplesse concourt à favoriser l’élévation du niveau de qualification dans le cadre de la formation tout au long de la vie, et permet d’individualiser les cursus d’apprentissage pour notamment faire face aux parcours de plus en plus fractionnés.  

La FAGE est la première organisation étudiante à s’être déclarée favorable à un changement de paradigme dans la pédagogie universitaire, en militant pour la valorisation de la logique de compétence dans l’enseignement supérieur, via la mise en place du student centered learning (SCL) conformément aux préconisations du processus de Bologne.

Ce débat pose la question de la compensation. La FAGE est favorable à une remise à plat des dispositifs de compensation parfois pédagogiquement contre-productifs. En aucun cas il n’est souhaitable de faire disparaître purement et simplement la compensation, au risque d’augmenter l’échec en licence et donc le niveau de tension des formations.

La FAGE plaide pour un système de compensation entre les unités d’enseignement qui concourent à l’acquisition de compétences voisines, ce système étant rendu possible avec la logique de bloc de compétences et de certification. Dès lors, et si une formation adopte une articulation en blocs de formation comprenant ces nouvelles compensations, alors les formes antérieures de compensations telles que la compensation annuelle, deviennent caduques et même contre-productives. En effet, s'il est possible dans cette approche d'avoir une compensation entre évaluations qui concourent à l'acquisition de la même compétence, il n'y a pas de cohérence à compenser des compétences différentes. En effet, nos formations valident un ensemble de compétences qui ne sont pas équivalentes et qui doivent toutes être acquises individuellement pour être réellement valorisables. C’est d’ailleurs un gage de la qualité de nos formations.

Enjeu n°3 : Évaluation, assurance qualité et pédagogie.

La réforme du Plan Étudiants va concrétiser l’autonomie pédagogique des Universités, chère à la FAGE. C’est une opportunité unique de mettre fin aux modalités de formation et d’évaluation archaïque de l’enseignement supérieur, qui mine l’Université depuis bien trop longtemps. La FAGE se réjouit de cette révolution pédagogique et plaide ainsi pour des dispositifs d’assurance qualité garants de l’efficacité des pédagogies qui se développeront dans nos établissements.

Outre la responsabilité du HCERES en la matière, dont les évaluations et préconisations se doivent d’être franches, transparentes, et sans tabou, les Universités doivent aussi développer leur propre système d’évaluation. C’est en partie le cas avec l’évaluation des formations aujourd’hui, qui reste assez marginale et surtout peu utilisée.

La FAGE revendique la nécessité de renforcer le poids et les responsabilités des étudiants et des élus étudiants dans l’évaluation des formations et des enseignements. La collecte et l’exploitation de ces données pourraient être au cœur des conseils de perfectionnement dans lesquels les étudiants doivent pouvoir être majoritairement représentés. La CFVU doit également être en mesure de fournir une synthèse des travaux des conseils de perfectionnement afin de mutualiser les pédagogies innovantes les plus efficaces.

Pour résumer, la revendication que porte la FAGE est la suivante :

Autonomie pédagogique => Plus de poids de la représentation étudiante => Meilleurs dispositifs d’évaluation

Enjeux n°4 : Contrat de réussite étudiante

Les contrats de réussite étudiante, promesse de campagne d’Emmanuel Macron, ressemble beaucoup aux contrats pédagogiques qui existent déjà dans nos Universités. Il s’agit ici d’une opportunité de l’inscrire dans le marbre, le prévoir pour les bénéficiaires des parcours d’accompagnement personnalisés mais aussi pour tous les autres publics spécifiques et notamment les étudiants bénéficiaires de régimes spéciaux d’études. Il serait également opportun de laisser le choix aux étudiants qui se retrouvent en difficulté, d’en bénéficier sur demande.

A l’instar des contrats pédagogiques, ce doit être un document, coconstruit par le responsable pédagogique et l’étudiant concerné. L’objectif est de personnaliser le cursus en fonction des lacunes, besoins, contraintes de l’étudiant.

Ce document présente l’avantage d’écrire et de définir noir sur blanc l'aménagement d'études qu'il convient d'adopter et notamment le cas des licences en 4 ans.

Gros point de vigilance néanmoins : Il serait inacceptable qu’un jeune se retrouve en difficulté financière à cause d’un dispositif pédagogique. Si l’objectif est véritablement la démocratisation des études supérieures, il ne faut pas qu’un dispositif pédagogique visant la réussite ne devienne un frein pour la poursuite d’études. Il en va de l’égalité des chances de réussite.

En conséquence, si la licence en 4 ans est imposée par le responsable pédagogique à un étudiant (cas des parcours d'accompagnement personnalisés), alors si l’étudiant est boursier, il est indispensable de lui octroyer un droit à bourse supplémentaire. Plus largement, la FAGE s'oppose à toute suppression des droits sociaux sur la base du non-respect du contrat de réussite.

Enjeu n°5 : 1 500 heures de formation

C'est probablement le point le plus important et le plus ambitieux. Il ne s'agit pas de toucher les 1 500 heures (dont beaucoup n'ont jamais entendu parler) pour le symbole. Le cap de la FAGE est simple et clair : augmenter les capacités d'accueil et améliorer la réussite des étudiants par un meilleur accompagnement pédagogique.

Aujourd'hui, les universités sont tenues d'effectuer 1 500 heures d'enseignement présentiel sur 3 années de licence. Certains enseignements ne peuvent se faire autrement, en particulier lorsqu'il s'agit de pratique. A l'heure du numérique, et de la diversification des pratiques pédagogiques, cette uniformité porte la responsabilité d'une limitation conséquente des capacités d'accueil et de la non-diversification des pratiques pédagogiques.

A la veille des vingt ans de la déclaration de la Sorbonne initiant l'espace européen de l'enseignement supérieur, il est temps de changer de paradigme et de donner toute sa place à une approche centrée sur l'étudiant.

Nous pouvons considérer que des heures de tutorat ou de travail personnel puissent entrer en ligne de compte dans le volume horaire total de formation, tel que le prévoit la définition des ECTS. ( 1 ECTS = 25 à 30H de travail personnel)

Nous n'avons pas pour ambition d'user nos fonds de culotte sur le banc de l’école comme autrefois, mais bien de découvrir, de s’ouvrir au monde. Nous pouvons mettre en place des enseignements dirigés, des découvertes, des recherches hors les murs de l’Université. Entre les musées, les laboratoires, les stades ou encore les palais de justice, il existe autant de lieux susceptibles de contribuer à notre formation bien plus efficacement que si nous étions bloqués dans une salle de classe. L’enseignement de demain doit tenir compte de ces nécessaires évolutions et prendre en considération les pédagogies de projet, de terrain ou de recherche.

C'est pourquoi nous devons faire évoluer le cadre des 1 500 heures, tout en assurant un socle minimum pour empêcher l'émergence de formations “poubelles”. L’accent doit être mis sur le travail personnel, sur l'émancipation intellectuelle, individuelle et collective, sur l'expérimentation, sur les compétences développées, acquises, évaluées. Là encore il s'agira d'encadrer ces évolutions dans l'arrêté licence.

Enjeu n°6 : Professionnalisation de la licence

La FAGE partage les enjeux de professionnalisation de la licence. L’université doit offrir des cursus courts pour s’insérer directement dans le monde professionnel après obtention du diplôme. Il s’agit également de développer, voir généraliser l’apprentissage dans ces formations courtes.

Outre cette ouverture, la FAGE plaide pour remettre à plat ce système à deux vitesses induit par la concurrence DUT/Licence. En effet, les IUT sont des formations sélectives dont plus de 70% sont des bacheliers scientifiques, souvent détenteurs de mention. L’essence du DUT est d’être un diplôme court qui favorise l’insertion professionnelle rapide. Or, avec 70% de poursuite d’études en licence puis très souvent en école d’ingénieurs, le DUT est surtout aujourd’hui un diplôme tremplin, employé pour contourner la licence, dans un cadre disposant d'un meilleur accompagnement, et limite fortement les bacheliers technologiques d’un accès large à ces formations et de cet objectif d’insertion professionnelle rapide après une formation courte. Les victimes de ce système sont les jeunes issus de catégories sociales modestes, souvent des titulaires de bacs technologiques ou professionnels, à qui il ne reste que l’Université s’ils souhaitent étudier.

On s’étonnera alors du taux d’échec massif de ces publics qui nécessitent plus d’encadrement, et plus d’accompagnement, donc plus de moyens (comme c’est le cas en IUT, dont le budget par étudiant est le double de celui de l’Université).

La FAGE souhaite mettre un terme à ce système à deux vitesses et plaide pour mettre en place une priorité d’accès des bacheliers technologiques dans les IUT avec un quota maximal de bacheliers généraux qui ne dépasse pas le quart des effectifs des formations.

D’ailleurs, cette logique doit pouvoir être étendue aux autres formations sélectives privées, et notamment les CPGE (Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles).

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