Le gouvernement annonce sa stratégie de transformation du système de santé - Plan santé 2022

19/09/18

Annoncée le 13 février 2018, la stratégie de transformation du système de santé a débouché le 18 septembre sur les annonces Ma Santé 2022. Alors que notre système a été par le passé le plus performant au monde, il doit actuellement relever de nombreux défis sous l’impulsion d’une vision et d’un cap politique clairement définis.

La Stratégie Nationale de Santé d’abord, puis le rapport charges et produits du Conseil National de l’Assurance Maladie et maintenant la Stratégie de Transformation du Système de Santé viennent définir ce cap pour les politiques de santé du gouvernement :

  • Accélérer le virage ambulatoire des patients

  • Accentuer l’action de prévention, notamment les populations à risque

  • Optimiser la coopération interprofessionnelle

Un système de santé inadapté aux besoins des patients

Le système de santé français est l’un des meilleurs au monde. Pourtant réside en son sein des inégalités importantes. Ces inégalités sont territoriales et sociales :

Les inégalités territoriales : la démographie des professionnels de santé est une question qui cristallise beaucoup de réponses. Se pose ainsi la question de la régulation des professionnels de santé qui doit répondre à des enjeux de santé publique : le vieillissement de la population, l’accroissement de la part des maladies chroniques, la perte de l’autonomie, l’accès à une prévention primaire au travers de la vaccination et du dépistage.

Les inégalités sociales : la santé de la population est fortement corrélée à la catégorie sociale à laquelle elle appartient, les plus favorisées ayant un accès meilleur à la santé que les classes les plus défavorisées. Ainsi, la classe socio-professionnelle, le revenu, la situation familiale etc. sont autant de déterminants de santé qui conditionnent l’adoption de comportement de santé et la réception des messages de prévention.

La récente stratégie de pauvreté doit permettre de réduire ces inégalités sociales et la FAGE travaille en ce sens au travers de mesures comme l’AGI ou les AGORAé qui visent à rétablir une justice sociale, et permettre un meilleur accès à la santé des populations les plus précaires.

Répondre aux enjeux de santé publique de demain

Coopérations interprofessionnelles

CPTS et structure de coopération interprofessionnelle

Les CPTS sont les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé. Les CPTS correspondent à des espaces de collaboration entre les professionnels de santé afin d’avoir une prise en charge pluridisciplinaire des patients dans le cadre des soins ambulatoires (= soins de ville). Les CPTS nécessitent une contractualisation avec les ARS (Agences Régionales de Santé), actrices de la régulation des professionnels de santé sur un territoire donné.

Afin de répondre aux enjeux de la démographie des professionnels de santé et du déploiement d’une politique de prévention ambitieuse, notamment à destination des jeunes, il est essentiel de les inclure dans ces espaces et permettre l’animation d’une démocratie sanitaire efficiente regroupant l’ensemble des parties prenantes.

En effet, les ARS et les CPTS sont des acteurs territoriaux de soins et de prévention importants, et il est nécessaire d’y inclure la jeunesse et la communauté universitaire, notamment au travers des centres de santé et des services sociaux des établissements d’enseignement supérieur et des CROUS.

La promesse de l’incitation à leur développement est accueillie favorablement alors que cela correspond à une des attentes d’exercice des futurs praticiens qui veulent davantage travailler en équipe.

Lien ville-Hôpital

Il y a des enjeux économiques dans la prise en charge ambulatoire des patients. La FAGE, seule organisation représentative des jeunes siégeant au Conseil d’Administration de la CNAM (Caisse Nationale de l’Assurance Maladie), se doit de porter la vision la plus juste sur le système de sécurité sociale tout en prenant compte des réalités économiques qui imposent une économie de 2 milliards € à la CNAM : si cette économie s’avère nécessaire pour préserver notre système de sécurité sociale, nous n’accepterons pas qu’elle se fasse au détriment de la santé de la population.

Le lien entre la ville et l’hôpital est un élément qui répond à ces enjeux : il primordial que ce lien se fasse au mieux afin d’éviter les ré-hospitalisations évitables, et donc des dépenses évitables. C’est en ce sens que la FAGE développera des propositions concrètes pour atteindre un tel objectif.

Partage des compétences

Les enjeux de santé publique autour de la vaccination se font de plus en plus forts. En effet, l’exacerbation des discours antivaccins pousse à réfléchir à des mesures ambitieuses pour permettre une protection vaccinale efficace au sein de la population. Les récentes avancées en la matière sont encourageantes (ndlr : les 11 vaccins obligatoires et la vaccination par les pharmaciens).

Révolution numérique et intelligence artificielle

Essor des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies doivent accompagner cette transformation organisationnelle du système de santé. Le numérique, l’intelligence artificielle s’implémenteront petit à petit dans les pratiques des professionnels de santé afin de les accompagner dans la prise en charge des patients. Néanmoins, ces nouvelles technologies posent des questions éthiques et la FAGE et ses fédérations seront particulièrement vigilantes à la prochaine loi bioéthique qui sera présentée à l’automne.

De la même façon, l’accès à l’information se fait de plus en plus facilement dans une société connectée où la transmission de l’information se fait de manière quasi instantanée. Il est essentiel de repenser des systèmes d’information en santé qui puissent offrir un accès à une information sûre, permettant par la même un déploiement des messages de prévention efficaces pouvant atteindre l’ensemble de la population indépendamment de la classe sociale. En ce sens, nous saluons l’annonce d’un Espace Numérique Patient pour tous les Français alors que nous avons réclamé ce dispositif lors des concertations.

Développer des nouveaux métiers

L’infirmier de Pratique Avancée a été créé suite à la loi de modernisation du système de santé de 2016. Cette profession doit permettre de répondre convenablement au virage ambulatoire ainsi qu’aux inégalités d’accès aux soins, toujours dans le cadre de la chronicité des pathologies et du vieillissement de la population.

Le décloisonnement de notre offre de soins est une innovation organisationnelle primordiale pour augmenter l’efficience de notre système de santé. La sortie des textes réglementaires cadrant la formation des Infirmiers de Pratiques Avancées (IPA) ouvre un panel de possibilités en termes d'organisation des soins. C’est un élément innovant qui améliore la prise en charge au niveau du suivi et de l’accompagnement du patient tout en faisant gagner en efficacité.

Observatoire des nouveaux métiers en santé :

Alors que notre société évolue dans un contexte d’innovations de rupture pouvant très rapidement transformer complètement une profession, il est indispensable de se doter d’un observatoire capable autant que possible d’anticiper ces changements à venir. Les enjeux sont doubles : collectivement, il s’agit de permettre à notre société de ne pas être en pénurie de compétences dans un champs professionnel spécifique en adaptant en temps réel la formation initiale afin de toujours offrir le meilleur accès possible à la santé, individuellement, il s’agit d’anticiper les besoins en plan de formation pour protéger les professionnels de l’(in)employabilité via la formation tout au long de la vie.

Une formation des professionnels désuète face à ces enjeux

Au-delà de la question de l’évolution rapide des métiers, la formation actuelle des professionnels du soin souffre de nombreux écueils :

  • Il y a trop peu de coopération interdisciplinaire

  • Les étudiants ne sont pas suffisamment formés à l’exercice avec le numérique

  • Les profils sont peu diversifiés, la formation mettant trop souvent de côté le versant humaniste, psychologique et sociologique des professions de santé au profit de profils hyper-scientifiques

Face à ces difficultés que rencontrent les formations de santé, le Président a fait l’annonce de mesures encourageantes. Prônant un enseignement supérieur ouvert où chaque jeune peut trouver sa place, la FAGE et ses fédérations serons attentives aux réformes des études de santé à venir afin qu’elles puissent permettre la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, mais aussi répondre convenablement aux besoins de santé de la population, les deux étant intimement liées.

Suppression du NC

De fait, nous sommes favorables à la suppression du Numerus Clausus réclamé depuis plusieurs années. Ce système peine à être efficace dans ses missions :

-Il est de plus en plus contourné par les étudiants français qui vont étudier à l’étranger pour revenir finir leurs études en France : l’enseignement supérieur français pourtant financé par le contribuable ne peut-il donc pas les accueillir ?

-Il ne tient pas compte des mobilités européennes liées à la reconnaissance mutuelle des diplômes, très importante dans certaines professions (plus d’1/3 des nouveaux inscrits à l’ordre – nouveaux praticiens autorisés à exercer en France- ont un diplôme obtenu hors de France chez les dentistes)

-Il nécessite d’anticiper une dizaine d’années au préalable les besoins avec beaucoup d’inconnues et de dynamiques changeantes (changements de mœurs pour les départs à la retraite, modalités d’exercice des jeunes praticiens etc.)

Par ailleurs, la sélection par numerus clausus s’accompagne d’une année de concours extrêmement éprouvante conduisant souvent les étudiants à s’investir corps et âme deux années de leur vie pour échouer au final. Nombre d'entre eux sont pourtant de bons étudiants qui finiront par obtenir un niveau master, suite à des réorientations dans des conditions difficiles après un échec au concours.

Cela entraîne par ailleurs un effet « mise initiale » important : après 2 années éprouvantes, souvent accompagnées malheureusement d’un investissement financier dans une structure de préparation privée, il est très difficile pour un étudiant admis de remettre en question son projet professionnel. Pourtant, quand les cours commencent et en particulier les stages hospitaliers, nombre d’entre eux peinent à s’épanouir. Mais la pression sociale et psychologique (engagement fort avec la mise initiale) inhibent fortement les projets de réorientation. Si certains abandonnent malgré tout, d’autres terminent leurs études et n’exercent pas le soin (fonctions administratives, journalisme etc.) : ils sont ¼ des néo-diplômés en médecine dans cette situation.

La fin du concours devrait permettre de mettre fin à la compétition entre étudiants et permettre de proposer des parcours d’accompagnement et des aménagements d’études notamment pour les étudiants salariés qui n’ont aucune chance dans le système actuel. Cette mesure redonnant leurs chances aux étudiants les moins favorisés, la PACES n’étant pas un système égalitaire : les plus aisés étaient favorisés (prépas privées heureusement compensées par le tutorat, appartement à proximité de l’université et cadre de vie facilitant les révisions) et les plus fragiles fortement pénalisés (le temps travaillé étant du temps de bachotage perdu par rapport à aux étudiants concurrents, un étudiant salarié a des chances minimes de réussir le concours. Il en va de même pour tout étudiant ayant à charge certains de ses frères ou sœurs ou toute autre situation).

Au-delà de l’homogénéisation des profils, les épreuves du concours posent également problème. Très scientifiques, elles ne donnent pas leur chance à ceux qui feront les meilleurs professionnels de santé, mais seulement au plus scientifique, voir simplement à ceux qui sont capables de mémoriser d’importantes quantités d’informations.

LMD et sortie du modèle de PACES

Les expérimentations d’alternatives à la PACES ont montré la voie : les alterPaces ont montré qu’un profil différent d’étudiants venus de licence pouvait réussir les cycles supérieurs des études de santé, et PluriPass que l’orientation progressive était une des clés de la dédramatisation de l’échec au concours.

Il convient désormais d’aller au bout de la logique et d’intégrer ces éléments en faisant rentrer les études de santé au sens large (y compris les cursus paramédicaux pour lesquels il convient de finaliser le processus d’intégration universitaire) dans le droit commun des autres formations universitaires. La mise en place d’un système de licence, plus progressif, laisse plus de temps à l’étudiant pour découvrir l’ensemble des débouchées de la santé ne se limitant par ailleurs pas aux professions ordinales. On rappellera qu’en termes de débouchées, le CHU est souvent le premier employeur de la région : on devrait pouvoir construire un certain nombre d’insertions professionnelles !

Cette réforme est également l’occasion de revoir le programme et valoriser l’apprentissage du management et des sciences humaines indispensables à la relation soignant-soigné. Ces éléments, communs à l’ensemble des professions du soin, pourraient par ailleurs faire l’objet d’un tronc commun entre ces métiers.

Il convient également de favoriser les ponts entre filières de santé, et également en dehors du monde de la santé. Pour les premiers, c’est l’occasion de favoriser la connaissance mutuelle des professions entre elles, et de favoriser les réorientations. Pour les seconds, il s’agit d’investir dès à présent dans les nombreux besoins des innovations en cours et à venir dans le domaine de l’intelligence artificielle ou encore des biotechnologies. Les cursus de santé gagneraient une énorme richesse à s’adosser davantage sur d’autres cursus universitaires d’informatique, cursus ingénieurs en diversifiant tout autant le profil des professionnels de santé qu’en favorisant des sorties par le haut pour des étudiants s’éloignant des professions du soin en leur permettant une continuité d’études.

Il est essentiel que des Mentions et des Parcours soient organisés en son sein : il ne s'agit pas de refaire les erreurs de la PACES et d’en étaler son fonctionnement sur 3 années avec un tronc commun prépondérant au détriment de la formation de certaines professions.

Accès à la recherche

Les cursus en santé possèdent également un accès à la formation à la recherche disparate : quand cette formation se surajoute selon des modalités locales dans la plupart des filières de la PACES, elle est souvent inexistante ou très peu développée dans les filières non-universitaires. Pourtant, son développement et notamment en ambulatoire est un enjeu important, notamment pour l’évaluation des médicaments en vie réelle ou pour l’amélioration des pratiques professionnelles. La réingénierie des cursus devant prendre en compte ces opportunités.

Cette réforme de la formation en santé, attendue depuis des années, est la dernière brique pour faire entrer pleinement ces études dans le processus de Bologne. Cette étape sera décisive afin de favoriser les mobilités européennes des jeunes et d’ouvrir nos cursus à l’international.

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