Le volontariat de service civique, objet de tous les fantasmes

07/09/16

L’étude du projet de loi Egalité-Citoyenneté au Sénat dans les prochains jours doit être l’occasion de supprimer l’amendement 524 portant sur la création d’une expérimentation de service civique obligatoire.

Comme son nom l’indique, le volontariat de service civique porte intrinsèquement en lui un caractère volontaire. En effet, il s’agit pour un jeune de 16 à 25 ans (30 ans pour les jeunes en situation de handicap) de consacrer 6 à 12 mois à une mission d’intérêt général. Afin de permettre à tout jeune de s’engager, le volontariat de service civique est indemnisé à hauteur de 573,65 € par mois (dont 467,34 € à charge de l’Etat et 106,31 € à charge de la structure d’accueil).

Lorsque l’on se retourne sur l’historique de la création du service civique force est de se rendre compte que sa gestation a été un processus en tension entre engagement volontaire des jeunes et volonté de forcer les jeunes à se mettre au service de l’Etat. Dès que le projet de suspension du service militaire a été rendu public par Jacques CHIRAC en 1996, ce dernier a fait part de sa volonté de créer un service volontaire et citoyen. Ce ne sera finalement qu’en 2006, notamment suite aux émeutes des banlieues de 2005, que sera créé le service civil volontaire, qui restera marginal par manque de financement et de volonté d’en faire une politique publique d’ampleur.

Poussés par la société civile, Ségolène ROYAL et Nicolas SARKOZY, alors candidats à la présidence de la République, se prononcent tous deux en faveur d’un service civique. Ce dernier sera concrétisé par la loi du 10 mars 2010 relative au service civique. Entre les deux, la FAGE publie sa Contribution pour un service civique universel et co-signe avec un collectif d’organisations de jeunes et associations les Principes fondamentaux pour un service civique universel. Ces deux textes jetant les bases du service civique tel qu’on le connait actuellement : engagement volontaire pour une mission d’intérêt général accessible à tous les jeunes sous la forme d’une étape de vie par sa durée d’au moins six mois.

Porté sous la présidence de Nicolas SARKOZY, voté à une immense majorité des parlementaires de tout bord puis confirmé et amplifié par sous la présidence de François HOLLANDE, le volontariat de service civique semble faire consensus. Néanmoins les attentats qui frappent Paris en janvier 2015 vont remettre au centre du débat politique un présumé manque de valeur citoyenne des jeunes, jeunes qu’il faudrait donc mettre au pas.

Dépassant les clivages habituels, la proposition de rendre le service civique obligatoire pour « inculquer les valeurs républicaines », « recréer de la mixité sociale » s’est concrétisée avec l’adoption de l’amendement 524 au projet de loi Egalité-Citoyenneté par l’Assemblée nationale en juillet. Et ce alors même que le Mouvement Associatif , l’AFEV, la FAGE, etc. ont réaffirmé leur opposition, déjà affirmée conjointement en décembre 2014 et ont été rejoints et soutenus par le Président de la République dans cette reconnaissance du caractère volontaire comme un pilier du service civique.

Cet engagement volontaire est crucial et non négociable pour la FAGE à au moins triple titre :

  • Rendre le service civique obligatoire se base sur un postulat qui est faux : celui d’une jeunesse qui ne s’engage pas alors qu’ils sont la tranche d’âge chez qui le bénévolat a le plus progressé entre 2010 et 2016[i] et plus de 80%[ii] à suivre l’actualité politique ;

  • En tant qu’association mobilisant des volontaires en service civique, ce qui fait toute la différence est la motivation des volontaires à s’engager pour le projet, à s’y impliquer en y mettant une part de son individualité, de ses passions et développera ainsi ses compétences et connaissances. Accueillir un jeune qui y a été forcé sera inutile tant pour le jeune que pour la structure d’accueil.

  • Donner pour objectif à un service civique obligatoire, de durée courte ou moyenne, les missions de mixité sociale et d’ « apprentissage des fondamentaux de la République » c’est fouler au pied l’Education nationale et renoncer à la réformer alors qu’elle dispose d’au moins 10 ans de scolarité obligatoire.

Plutôt que de transformer un dispositif utile à la société et aux jeunes en une punition, il est urgent de s’atteler aux réelles problématiques qui touchent les jeunes : une école qui renforce les déterminismes et est profondément inégalitaire, une classe politique qui ne ressemble pas et ne parle pas aux jeunes, un accès aux droits sociaux discriminé en fonction de l’âge, etc.

La FAGE soutien et prend une part active à l’objectif de montée en charge du service civique afin qu’à court terme chaque jeune qui le souhaite puisse effectuer un volontariat de service civique (il y a aujourd’hui malgré 70 000 missions par an, 3 fois plus de demandes que d’offres) et à long terme la moitié d’une classe d’âge (soit environ 350 000 jeunes) souhaite et puisse s’engager grâce au volontariat de service civique.

[i] L’évolution de l’engagement bénévole associatif en France, de 2010 à 2016 - Etude France Bénévolat 03/2016

[ii] Rapport de l’enquête 2014 de l'Observatoire de la jeunesse solidaire “Les jeunes et l’engagement politique”

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