Loi de santé : protégeons les jeunes sans les stigmatiser

08/04/2015

La FAGE tient à rappeler qu’il est indispensable d’avoir un message entièrement cohérent en matière de prévention auprès des jeunes, dont les consommations excessives sont en augmentation depuis plus de 10 ans comme l’indique le baromètre Santé Inpes 2014.

Il est impensable que dans un même projet de loi de santé, les pouvoirs publics souhaitent adopter des mesures réprimant l’incitation à l’ivresse publique lors de séance de bizutage ou créer une infraction sur la provocation à la consommation excessive d’alcool, et envisager parallèlement d’assouplir la loi Evin en matière de publicité sur les boissons alcooliques.

Le 18 mars dernier, lors de l’examen du projet de loi de santé, la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale a adopté un amendement qui remettait en question la définition actuelle de la publicité directe ou indirecte autour de l’alcool.

Rappelons qu’aujourd’hui, la loi Evin permet à la fois l’information sur les boissons alcoolisées et un encadrement pour la publicité. En réduisant de manière restrictive la distinction entre information, publicité et communication, le lobby de l’alcool souhaitait réduire le champ d’application de la loi de 1991.

Forte heureusement, les échanges du 1er avril dernier, à l’Assemblée Nationale, ont permis d’obtenir le retrait de cet article et la FAGE s’en félicite. Elle ne peut cependant que désapprouver la suppression des autres dispositions de prévention liées à la consommation d’alcool, notamment l’article d’Olivier Véran qui préconisait l’adaptation du message sanitaire « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé » en fonction des supports de communication, des produits et des publics.

La FAGE, en tant que 1ère organisation représentative étudiante, souhaite alerter les parlementaires et le groupe de travail (mis en place pour réfléchir aux « difficultés d’interprétation en matière de droit que poserait la loi Evin ») sur les difficultés que représenterait une modification de la loi Evin pour les acteurs de prévention agissant auprès de la jeunesse.

En effet, le 1er avril 2015, l’Inpes publiait également son baromètre santé 2014 sur les ivresses de plus en plus fréquentes chez les jeunes. Selon cette enquête, en 10 ans, la part des 18 – 25 ans ayant connu une ivresse dans l’année a augmenté de 13 points, avoisinant désormais les 50 % et la part de ceux en ayant connu au moins trois a presque doublé (29% en 2014). Le principal public concerné par l’augmentation du nombre d’ivresses répétées sont les jeunes étudiantes.

Ces ivresses sont caractérisées par des Alcoolisations Ponctuelles Importantes (API), mieux connu sous le nom de binge drinking, qui marquent un phénomène générationnel.

Ces chiffres démontrent à eux seuls la nécessité de la prévention, menée parallèlement en matière de santé publique et dans le champ de la sécurité routière. Pour autant les messages de prévention ne peuvent rester cohérents que si les pouvoirs publics s’y associent par l’adoption ou le maintien de loi visant à limiter la promotion réalisée par les alcooliers, dont les cibles privilégiées sont avant tout les jeunes. Sans cela, il ne sert à rien de s’alarmer sur cette consommation excessive et les risques que cela provoquer en matière d’insécurité routière.

Par ailleurs, l’article 4 du projet de loi de santé prévoit l’instauration d’une infraction générale sur la provocation à la consommation excessive d’alcool, qui vise directement à lutter contre le Binge Drinking. Cette répression, utile, n’est viable que si elle s’applique de façon égale à toute la population, et ne cible pas uniquement les jeunes.

En effet, en matière de lutte contre l’alcool, ces derniers sont souvent stigmatisés et leur consommation analysée sous tous les angles. Mais que dire du reste de la population française ? Ne faut-il pas aussi dénoncer l’alcoolisme mondain, tout aussi dangereux en matière de santé publique ? N’y a-t-il pas des études à mener de façon récurrente sur ce sujet ? Alors que la loi interdisant les open bars est généralement appliquée dans les soirées étudiantes, que se passe-t-il au niveau des after work et autres cocktails organisés par les entreprises et administrations ? Sont-ils vraiment si exemplaires pour la jeunesse ?

Au-delà de la loi Evin et de la consommation d’alcool, il nous semble nécessaire de garder une stratégie préventive compréhensible et rationnelle au niveau des jeunes sur tous les domaines de santé publique. Le fait d’envisager l’assouplissement de la loi Evin sur la publicité autour de l’alcool n’est-il pas en totale contradiction avec celui d’introduire des paquets de cigarettes neutres, limitant ainsi la promotion marketing des lobbies du tabac ?

L’objectif de la FAGE est avant tout d’informer, de sensibiliser, d’orienter et d’agir directement sur des thématiques sanitaires particulièrement importantes et propres aux jeunes. L’action de la FAGE s’articule donc autour de deux axes : la lutte contre les comportements à risques et la promotion du bien-être en milieu étudiant, dans le cadre d’une démarche de prévention par les pairs.

Cette prévention, pour qu’elle soit efficace, doit s’inscrire de façon globale, dans la durée et la proximité. Les acteurs de prévention de terrain sont aujourd’hui les mieux placés pour identifier les problèmes des jeunes et y apporter des réponses.

Les pouvoirs publics doivent donc être à leur écoute pour :

  • relayer leur demande
  • les traduire dans le domaine législatif
  • inscrire la prévention comme une mission obligatoire et lui assurer des financements pérennes

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